Broue, Saint-Sornin : fouilleurs en action, 2024 (cliché Ph. Duprat)
La fouille programmée (commencée dans le cadre du PCR « Les marais charentais au Moyen Âge et à l’époque moderne. Histoire – Archéologie – Environnement, sous la direction de Éric Normand et Alain Champagne ») avait permis de démontrer que le site castral de Broue n’était pas un château à vocation militaire, mais plutôt un lieu central ostentatoire du commerce du sel pour l’ensemble du golfe jusqu’au XVe siècle. Les campagnes de la dernière triennale avaient mis au jour un grand logis seigneurial fortement remanié après un incendie à la fin du XIIe siècle, et une vaste chapelle attenante, dont la localisation était inattendue (2019-2020) L’année 2021 avait élargi les investigations aux abords immédiats de ces bâtiments, en direction de l’ouest et du sud.
Interrompue par les conséquences de la crise sanitaire (2022), mais aussi en raison de la masse des informations à traiter (2023), la fouille du site castral a repris en 2024 sous la forme d’une nouvelle triennale consacrée au vaste habitat qui entoure la demeure seigneuriale et la chapelle attenante. La fouille méthodique de cette zone apportera des connaissances décisives sur sa nature exacte et son évolution entre le XIe et le XVe siècle.
La Société de Géographie est administrativement associée à cette fouille, et plusieurs de ses membres participent chaque année activement aux fouilles d’été, dirigées par Éric Normand. Ce travail sur le terrain se poursuit durant l’automne au dépôt archéologique de Saint-Vivien, où des membres de la SGR nettoient, trient et reconditionnent le mobilier recueilli sur le site lors de la fouille, avant étude par des spécialistes.
Test de navigation, août 2023 (cliché AREPMAREF)
La découverte en 2013 au Priouté (Port-d'Envaux) de deux épaves mérovingiennes a permis de lancer un projet novateur d'archéologie expérimentale, basé à Tonnay-Charente : reconstruire à l'identique une barque mérovingienne bien datée (fin du VIIe-début du VIIIe siècle) et archéologiquement documentée (P. Moyat et J.-F. Mariotti). Ce projet ambitieux, mis en œuvre en 2017 sous l’égide de la DRAC (en collaboration avec les jeunes de l’IME de la Croix-Rouge de Tonnay-Charente sous la direction d'un charpentier de marine, l’AREPMAREF : archéologie subaquatique, le Club d’Histoire de Tonnay-Charente et la Société de Géographie de Rochefort), touche à son aboutissement : après des retards liés à la crise sanitaire, une maquette au 1/5e a pu être réalisée (2020) avant le travail ardu de reconstitution grandeur nature, une conférence sur le contexte historique du haut Moyen Âge (Philippe Duprat, 2021), et plusieurs actions pédagogiques (École élémentaire de Plaisance à Tonnay-Charente, 2023).
La réplique de la barque à l'échelle 1/1 a été achevée en 2023 : la mise à l’eau a eu lieu en 2024, avec un baptême festif le 14 juillet. Des essais de navigation sur la Charente dans le courant de l’année ont permis d’utiliser avec succès des avirons et une petite voile carrée, et de constater son excellente navigabilité à marée montante (direction Saintes) et à marée descendante (direction océan). D’autres essais sont prévus pour affiner les informations et pour concrétiser des tests de charges, avec l’objectif d’atteindre Saintes par étapes. Ce travail original d’archéologie expérimentale ouvre d’intéressantes perspectives concernant le commerce fluvial sur la Charente durant le haut Moyen Âge.
Bibliographie
Sol dallé de la salle Saint-Antoine (Cliché A. Dalançon, sept. 2023)
Le bagne de Rochefort, qui a fonctionné de 1766 à 1852 au cœur du système productif de l’arsenal, a disparu de la mémoire rochefortaise malgré les 25 000 forçats qu’il a hébergés, dont plus de la moitié sont morts en détention. Depuis 2019, la Société de Géographie travaille sur l’histoire de cette institution pénitentiaire (exposition, brochure dédiée, articles, conférences…).
Mais les derniers vestiges du monument, situé dans la partie sud de l’arsenal, ont été irrémédiablement anéantis par l’extension de l’entreprise Airbus en octobre 2023, après une fouille préventive d’un mois et demi, dirigée par Théo Aubry (Service archéologique départemental) : structures de l’aile Sud et sols dallés des salles Saint-Antoine et Doubles chaînes (réservées aux forçats endurcis), salle des convalescents. Les résultats de la fouille ne sont pas encore disponibles.
Il restait toutefois un infime espoir : celui de pouvoir fouiller les structures de l’aile Est, et peut-être conserver un partie de ce « lieu de mémoire » au sens où l’entendait Pierre Nora. On pense en particulier à la fontaine du bagne, petite structure enterrée (avec bassin ou citerne), ou aux cachots actuellement couverts par la rue de l’Arsenal et ses trottoirs, récemment acquis par Airbus. Une intervention archéologique légère, conduite par Théo Aubry, s’est déroulée en septembre dernier : le creusement d’une petite tranchée de réseaux n’a malheureusement pas permis de retrouver les vestiges de la fontaine des bagnards.
Dans l’immédiat, un parcours signalétique est en cours d’élaboration (mairie, CARO, SGR) au niveau du Magasin général, en liaison avec le Chemin de Charente pour faire connaître et mettre en valeur cet émouvant lieu mémoriel, en attendant, peut-être un jour, un espace dédié.
Orientation bibliographique
Cliché Ph. Duprat, sept. 2024
Une fouille programmée a commencé en septembre 2023 sous la direction de Bastien Gissinger, sur le site du petit amphithéâtre gallo-romain de Saint-Georges du Bois, près de Surgères, avec la participation de la Société de Géographie. Cet amphithéâtre, découvert par photographie aérienne en 1976 par Jacques Dassié, avait été sondé entre 1977 et 1979 par Camille Gabet, qui en avait retrouvé la structure globale.
L’intervention de 2023 a permis de reconnaître avec précision l’ensemble de la structure datée du 1er siècle de notre ère (bases en pierre, supportant une superstructure en bois). En 2024, la deuxième phase de la triennale (02-20 septembre) a concerné une surface plus étendue de l’entrée nord de l’arène, ainsi que l’exploration de la zone des temples, à quelques centaines de mètres.
Bibliographie
GABET C. : "L'amphithéâtre gallo-romain de Saint-Georges-du-Bois", Revue de la Saintonge et de l'Aunis, t. 9, 1983, p. 7-12.
GISSINGER B. : Les promesses de l'amphithéâtre de Saint-Georges-du-Bois", Archéologia n° 627 p. 10-11.
Rochefort, rue des Mousses: immeuble de l'Eden (cliché Ph. Duprat)
Courant septembre 2024, un petit diagnostic a été réalisé par Catherine Vacher (Inrap) à l’emplacement d’un vieil immeuble entre la rue des Mousses et la rue de la Ferronnerie, dans la ville intra muros, qui est une zone protégée. Ce secteur, peu habité au XVIIe siècle, s’urbanise à partir du XVIIIe. Il s’agit de l’ancien « quartier chaud » de Rochefort, dominé par son immeuble emblématique, la maison de passe L’Éden, très fréquentée par les marins aux XIXe et XXe siècles. Malheureusement le diagnostic, pratiqué sur la zone arrière de l’immeuble, s’est révélé négatif.
Rochefort, Hôpital de la Marine : une tranchée d'évaluation (cliché Ph. Duprat
Dans les derniers jours de juin 2024, un diagnostic archéologique a été réalisé par Catherine Vacher (Inrap) dans les jardins de l’Hôpital de la Marine de Rochefort, avant d’importants travaux d’aménagement. Les archives sont relativement pauvres sur ce site emblématique de Rochefort, situé sur une hauteur. Avant l’édification par l’ingénieur Toufaire entre 1784 et 1788, il s’agissait d’une zone inhabitée dite « La Sablière », qui n’était autre que la « place où l’on éprouve les canons » dès 1688 : les épreuves des canons s’y déroulent tout au long du XVIIIe siècle. Sur un plan de 1741, on distingue la butte où étaient installés les canons à tester. Le « Moulin du Bois » qui s’y trouvait également est déclaré comme « ruiné » dès cette époque.
Les nombreuses tranchées creusées sur 3 ha devant et derrière le bâtiment central n’ont rien révélé d’antérieur à la fin du XVIIIe siècle : des canalisations et d’énigmatiques structures de bassins. Les vestiges en place d’une glacière datée du tout début du XIXe siècle (dont la restauration pourrait être envisagée) n’ont pas été touchés par les travaux.
Quai Louis XV, avril 2024 (Cliché Ph. Duprat)
En avril 2024, une fouille préventive a été conduite par Aude Valérien (Inrap) sur le quai Nord de la double forme, dit « Quai Louis XV », entre l’actuel labyrinthe et la sortie de la forme. Reposant sur un radeau de bois et plusieurs fois remanié, il présentait un aspect très dégradé, lié à son histoire : dès l’achèvement de la double forme en 1687, les constants problèmes de bouchons de vase et d’infiltrations d’eau suscitèrent de lourds travaux jusqu’au milieu du XVIIIe siècle.
La fouille a fait apparaître divers états du quai, ainsi que plusieurs canalisations, dont la plus importante semble longer le quai pour se jeter plus loin dans la Charente : elle pourrait être l’aboutissement d’une évacuation d’eaux pluviales qui traverse la fontaine Saint-Charles (au bout de la rue Audry de Puyravault). Plusieurs gros anneau d’amarrage ont été dégagés, dont l’un encore en place servait aux manœuvres pour faire entrer un vaisseau dans la forme, comme l’indique un plan daté de 1819. Notons également que le « moulin de Hubert » se trouvait à l’extrémité de ce quai, ainsi que le laminoir qui lui était associé.